Quelques propositions aux acteurs dans ce secteur.
En mai 2011, le président Joseph Michel Martelly, lors de son discours d’investiture, a déclaré : « Haïti is open for business », et de fait, un climat a été créé pour favoriser l’investissement. Durant son mandant, bon nombre d’initiatives ont vu le jour dans le domaine touristique comme par exemples l’inauguration de Best Western, Royal Oasis et Marriott ainsi que la création des petites et moyennes entreprises dérivant des métiers du tourisme, de l’hôtellerie et de la restauration. Propice à un climat de stabilité et de sécurité, ces efforts conjugués ont permis le replacement de la destination d’Haïti sur la carte touristique mondiale. Mais ces dernières années, le pays connait une situation délétère. Entre revendications sociales, manifestations de rue, insécurité, warning des Ambassades et pays lock : quel est l’avenir des jeunes qui travaillent dans le secteur touristique haïtien ? A travers ces lignes, je piste quelques propositions pour les protagonistes.
Le tourisme est la mise en valeur des ressources naturelles, culturelles, historiques et patrimoniales pour devenir des attractions. Cette attractivité cohabite avec d’autres secteurs dont l’hébergement et la restauration. En ce sens, outre la visite des sites, l’hospitalité et l’accueil, les touristes ont besoin un espace de restauration et d’hébergement : marchand ou non-marchand pour (sur)vivre et pour assurer leur nuitée et leur sécurité d’une certaine manière. Selon les hôteliers et la ministre du tourisme, le taux d’occupation des chambres est compris entre 2 à 4% suite au classement d’Haïti par les Etats-Unis d’Amérique dans la catégorie des pays à haut risque ou à ne pas visiter. Ce qui a pour conséquences la mise en disponibilité des réceptionnistes, des serveurs et serveuses, des barmans, des sommeliers, des cuisiniers…
Cette décision on peut la qualifier d’ «injuste » ou de « sévères » car il n’y a pas eu d’attaques terroristes, de morts ou de lynchage des touristes qui y séjournaient. Hélas, le mal est fait ! Quoi qu’il en soit, par cette alerte générale de niveau 4, les jeunes professionnels voient leur rêve brisé. Certains et certaines voulaient effectuer un stage dans un hôtel catalogué et d’autres pensaient à un emploi saisonnier ou durable voir un stage de formation. Ces rêves pourraient partir en fumée et c’est douloureux ! Certes, c’est douloureux ou l’avenir peut-être hypothéqué mais que faut-il faire ?
Considérant que la population est jeune, et de fait, elle l’est. Il n’est et ne sera pas plausible de faire un deuil. C’est le temps, au contraire, de mobiliser nos ressources humaines, nos savoir et savoir-faire pour remettre nos pendules à l’heure en corrigeant nos erreurs, en s’organisant selon nos visions , en rêvant nos projets et en les concrétisant sans être un adversaire du temps. Nicolas Boileau dans l’Art poétique disait :
« Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, polissez-le sans cesse, et le repolissez, ajoutez quelquefois, et souvent effacez »
Animée de ce courage, en tant qu’étudiante qui évolue dans le monde de l’Hôtellerie et de la Restauration depuis 2015, je crois fermement qu’on trouve l’opportunité de repenser le développement touristique d’Haïti en intégrant toutes les forces vives de la nation et, on ne doit ou ne peut pas la louper cette occasion sous aucun prétexte. Pour ce faire, j’ai des propositions à vous faire :
1. Il serait de bon ton d’organiser une assise sur le développement touristique haïtien en incluant tous les métiers directs et transversaux ;
2. Le Ministère du tourisme devrait diagnostiquer ses projets eu égard à sa loi organique en utilisant des outils comme SWOT, PESTEL et PORTER. Ces derniers permettent non seulement d’analyser mais aussi de mesurer nos ressources disponibles.
3. Il serait impératif de définir de bonnes stratégies de communication touristique en référence aux réflexions de Pierre Frustrier. Les objectifs de celles-ci doivent s’asseoir sur ces 3 piliers :
a) au niveau Cognitif : faire savoir les vecteurs touristiques dans le pays (destination, offre, produit) s’informer.
b) au niveau affectif: faire aimer, séduire, le désir et se faire apprécier en donnant une image dynamique responsive.
c) au niveau conatif : faire agir, passer à l’action en consommateur en le poussant à acheter ou du moins à se renseigner ou se déplacer ;
4. Il s’agirait d’organiser 4 grands événements pour projeter une image plus positive.
5. Former des journalistes aux questions relatives au tourisme.
Certes cette liste n’est pas exhaustive mais elle peut orienter tous les acteurs touristiques qui croient leur rêve brisé ou en agonie. Ce temps, pour finir, n’est pas à l’abandon, à la stagnation ou au désespoir. En revanche, c’est celui de (re)penser, (re)dynamiser, (re)définir et de se (re)grouper pour faire du tourisme le véritable de moteur de développement du pays.
Anne Martine MICHEL