Port-au-Prince, le 18 octobre 2018._ La manifestation du 17 Octobre dernier dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, a été un véritable succès. Depuis plusieurs décennies, jamais une foule aussi immense n’a investi les rues pour une cause aussi noble. Mercredi, des milliers de personnes ont répondu à l’appel de la classe politique et des Pétrochallengers pour exiger la reddition des comptes du programme PetroCaribe. Mais au fonds, l’aile dure de l’opposition profite de la naïveté des initiateurs du PetroCaribe Challenge pour profite des retombées du mouvement.
Plus d’un pensent que la classe politique n’a pas assez force pour attirer autant de personnes dans les rues, sinon elle aurait renversé le régime de Michel Martelly dès le début de son mandat. Mais le 17 octobre dernier, politiciens et leurs partisans ont grandement contribué à la réussite de cette journée.
Les observateurs qui étaient au Carrefour de l’Aéroport dans la matinée allaient vite comprendre que la manifestation tardait à se lancer en attendant la vraie foule. Les challengers, qui misaient sur la prudence, attendait sans succès le signal des initiateurs du mouvement pour faire le déplacement. Vu le suspense qui planait sur la capitale.
Les politiciens ont profité de ce réveil citoyen pour atteindre leur objectif. Ils ont rassemblé plusieurs bandes à pieds pour attirer leurs sympathisants en faisant le tour des zones défavorisées. D’ailleurs, des milliers d’alliés de Fanmi Lavalas chantaient l’hymne du parti et brandissaient des photos de Jean Bertrand Aristide avant de rejoindre le rassemblement au Carrefour de l’Aéroport.
Alors que les PetroChallengers avaient de beaux T-shirts et distribuaient des posters anti-corruption, les groupes politiques étaient munis de pancartes avec des slogans provocateurs, se faisaient accompagner de plusieurs centaines de motards, de plusieurs rara et faisaient leurs cérémonie de Vodou comme à l’accoutumée.
Peu avant midi, une foule immense venant de bas-Delmas a donné le signal de départ de la manifestation. Des milliers de participants ont grossi les rangs tout au long du parcours de Delmas. Tandis que les PétroChallengers réclamaient la reddition des comptes de PétroCaribe et l’arrestation des dilapideurs, l’autre partie exigeait le départ du pourvoir en place tout simplement.
Arrivé sur la place St-Pierre à Pétion-Ville, ceux qui ont le contrôle de la rue voulaient se rendre à la résidence du Président Jovenel à Pèlerin. La Police a réagi en dispersant la foule à coup de gaz lacrymogène. Une grande partie des PétroChallengers, qui n’optent pas pour la violence, ont vite abandonné la manifestation tandis que les militants politiques et alliés ont résisté par des jets de pierres et de bouteilles.
En passant par Bourdon, alors que les internautes révoltés prêchaient la non-violence, les autres faisaient quelques casses sur la route.
Arrivé à Post-Marchand, la Police Nationale D’Haïti a brutalement dispersé la foule pour des raisons non dévoilées. Le reste des PétroChallengers a remboursé chemin, tandis que les « jusqu’au boudistes » allaient affronter les forces de l’ordre à quelques mettre du Palais National.
S’il est vrai qu’une tentative de récupération du mouvement lancé le 24 août 2018 par un Sit-in par devant la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif était issu de la société civile juvénile, le poids de la classe politique n’est pas à ignorer le 17 octobre 2018. Des milliers de personnes non souchées avec les PétroChallengers dont la véritable force se trouve sur les réseaux sociaux, sont sortis des milieux sociaux de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince telles La saline, Carrefour Péant, Delmas 2 et Saint Jean Bosco fiefs des partis politiques de l’opposition depuis quelques temps en support à la reddition des comptes sur les fonds de PétroCaribe.
Autres faits à signaler dans la grande mobilisation à Port-au-Prince qui donne des suspicions quant à la récupération politique du mouvement des PétroChallengers, est la présence au sein de la Manifestation de petits drapeaux noirs et rouges symbolisant le duvaliérisme dans le pays. Depuis quelques mois, Nicolas Duvalier, fils de Jean Calude Duvalier se profile pour être le remplaçant de Jovenel Moïse en 2022.
Au lendemain de la manifestation, lors d’une conférence de presse, le secteur démocratique et populaire s’est dit satisfait de la participation massive de la population dans la journée du 17 et dresse le bilan de cette grande mobilisation. Selon Me André Michel, le président Jovenel Moïse est symboliquement et politiquement destitué et n’est plus le dirigeant légitime de ce pays.
Pour sa part, Dr Schiller Louidor de Fanmi Lavalas a annoncé que les manifestants resteront dans les rues jusqu’au 20 Octobre et dit être prêt à aller jusqu’au bout de la bataille qui doit acter le départ du président Jovenel Moïse.
Aucune note presse de la part des initiateurs du mouvement PétroChallenge n’a été publiée jusqu’à date, laissant ainsi le champ libre aux politiciens pour orienter ce réveil citoyen à leur cause.
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