Le Guédé au cimetière de Port-Au-Prince ne semble pas rester égal à lui-même au fil des ans, malgré la célébration de la Toussaint le jeudi 1er et celle de la fête des morts vendredi 2 novembre 2018. On a remarqué, cette année, une foule, moins nombreuse que les années précédentes, de vodouisants qui se sont rassemblés dans les cimetières pour danser, jeter de l’eau en mémoire des personnes mortes et offrir des offrandes au Loa Guédé. Mais, la spiritualité et la culture haïtiennes se manifestaient dans une ambiance de carnaval.
Au cours de ces deux jours, pendant que des fidèles protestants se réunissaient dans leur temple pour prier, les adeptes du Vodou prenaient la direction des cimetières. Question justement de procéder à des dévotions magico-religieuses en l’honneur, dit-on, de Guédé. Dans la mythologie du Vodou, «les guédés symbolisent la fertilié et l’esprit des morts. Certains auteurs relatent une relation enchevêtrée dans une dynamique mort/vivant-vivant/mort» a relaté le sociologue haïtien, Junior Similien, marchant au cimetière de Port-au-Prince, communément appelé «Grand cimetière».
Comme chaque année, les cimetières, comme le grand cimetière de Port-au-Prince, ont été convertis en de véritables scènes où étaient offerts gratuitement des spectacles de rituels traditionnels exécutés en l’honneur des divinités associées à la mort. Les vodouisants chantent constamment. Merline Louis, fière d’être vodouisante, a mentionné qu’elle vient au cimetière chaque année pour vénérer ses parents décédés. «Je leur apporte des fleurs, du rhum et d’autres objets. Je suis possédée par les «Loas Ogoun et Guédé Nibo», nous a confié la dame.
Toujours selon le sociologue Similien, un peuple sans culture est un peuple sans âme. «En effet, sans nous en rendre compte, ce rejet de cette partie de notre culture fait de nous des êtres sans âmes, des zombis. Il y’a beaucoup de personnes dites protestantes créant des moyens pour éviter que les non-protestants viennent célébrés leurs morts», a-t-il précisé, tout en confirmant que les Guédés sont dirigés par les Barons comme : Baron La Croix, Baron Criminel, Baron Samedi (premier homme à être enterré dans un cimetière), et Grann Brigitte (sa femme). « Le Baron rempli également une fonction de Legba», a-t-il mentionné.
Une grande mobilisation évangélique s’est fait aux alentours, où des fidèles du protestantisme, ayant chacun, une bible en main, donnent des messages, qu’ils qualifient de messages de vie, aux non-chrétiens qui rentrent et qui sortent du cimetière. Cependant, dans le périmètre de la croix du Baron, à la chapelle «Notre-Dame des sept douleurs», des fidèles catholiques mêlés aux vodouisants implorent et fredonnent des cantiques. Par moment, des prières sont adressées à la divinité en qui ils croient. À l’intérieur de ce temple ecclésiastique planté au beau milieu du cimetière de Port-au-Prince, il se crée une vraie atmosphère de méditation et de recueillement.
Selon une “Manbo”, les couleurs traditionnelles des Guédés sont le noir et le violet. Cependant, le Guédé Nibo se déguise en général en trois couleurs : noir, mauve et blanc. Pour elle, la fête des morts représentent une parfaite harmonie, un moment d’amour et de fraternité. «C’est notre jour de fête pour célébrer notre supporteur pour tout ce qu’il a fait dans nos vies», a-t-elle fait déclaré en dassant devant une tombe.
Les fameuses lunettes noires, le visage barbouillé de poudre blanche, la bouteille à eau pimentée et le bâton sculpté, sont des éléments incontournables pour la personne dont Guédé possède le corps. Et, la personne sous l’emprise de ce Loa ne craint rien, et manifeste souvent leur état d’esprit lorsqu’elle surgit – mangeant du verre, des piments crus, et enduisant leurs organes sexuels de piment et de rhum.
Crédit Photo : Snayder Pierre Louis
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