«Malgré les difficultés que nous rencontrons, la démocratie se porte bien en Haïti», telle a été l’une des déclarations prononcées par Jovenel Moïse lors de son allocution devant les Nations-Unies, ce lundi 22 février 2021.
Face à la situation chaotique que connaît Haïti depuis quelques temps, le Conseil de sécurité des Nations-Unies qui s’est réuni ce 22 Février s’est panché sur la crise institutionnelle en Haïti.
Au cours de cette rencontre virtuelle où plusieurs représentants diplomatiques et chefs d’États mondiaux étaient présents, Jovenel Moïse a proféré de nombreux insultes et mensonges sur des secteurs clés de la vie nationale tels un affront à la démocratie.
Dans son allocution, le Président Moïse a assuré sans broncher au Conseil que malgré les difficultés politiques en Haïti, la démocratie n’est pas menacée. Une déclaration que contredit la résonnance de ses actes antidémocratiques sur l’échiquier politique, comme la prise démesurée de plus d’une dizaine de décrets qui entravent la liberté individuelle ou qui limite le pouvoir des institutions du pays. On peut citer la limitation du pouvoir de la CSC/CA, l’arrestation illégale de plusieurs acteurs politiques notamment le juge Yvickel Dabresil. La révocation et le remplacement immédiat de 3 juges à la Cour de Cassation. Les dérives judiciaires et les récentes répressions policières lors des derniers mouvements de protestation dans le pays pour ne citer que cela.
Avant même la tenue de cette réunion, le président a entendu la position de plusieurs universités américaines, celle de certains membres du congrès américain et enfin de la conférence religieuse du Canada qui ont tous pris parti pour la démocratie qui est mis
en danger par le régime de PHTK. Ce que Jovenel Moïse a ignoré tout comme l’appel de plusieurs acteurs politiques du pays et du peuple.
Premier mensonge:
Jovenel Moïse a déclare: “64 gangs armés sont traqués sur un total de 102”. Alors que dans toutes les conférences accordées par la PNH, le porte Parole de l’institution n’a fait état que de 2 gangs délogés, sans aucune arrestation ni saisie réelle d’armes, le président annonce à la surprise générale qu’ils ont demandé plusieurs gangs, alors que les plus puissants se sont fédérés sous les auspices du CNDDR. Et, qui plus, on accorde le chapeau de cette initiative à son gouvernement. Des 64 gangs démantelés, l’on n’a jusqu’à date aucune idée du nombre d’interpellations et des armes et munitions saisies.
Pourquoi un gouvernement de propagande aurait-il caché ces exploits à l’heure de sa plus grande dénonciation, où le peuple exprime le plus grand rejet à son encontre ?
Deuxième mensonge:
Jovenel Moïse avance que les gangs sont déguisés en journalistes pour attaquer les Policers.
Incapable d’expliquer la répression policière évidente que connaît le pays lors des récentes manifestations qui visent son départ du pouvoir, Jovenel Moïse accuse des journalistes qui ont été à plusieurs reprises victimes lors des manifestations dans le pays.
On a tous les noms des journalistes tabassés, humiliés, blessés par la police, on connaît aussi leurs médias où ils travaillent. Citons par exemple : Georges Allen de Radio Télévision Caraïbes, Diego Charles de Vision 2 000, le photojournaliste Édris Fortuné qui a reçu bombe de gaz lacrymogène aux yeux, Dieu-nalio Chery blessé au pied, Alvarez Destiné et Meus Jean blessés par balles policières et les journalistes de Télé Pacific attaqués dans leurs véhicules pour ne citer que ceux-là.
Au pied du mur, le président n’arrive même pas à anticiper les grandes questions suscitées par sa politique de terreur et son laxisme sur la recrudescence des gangs. Pour se sortir du pétrin, Jovenel a menti en accusant les autres afin de se dédouaner. Ce que les representants des nations présentes à la rencontre ont bien compris.
Tous ses journalistes étaient-ils ces gangs déguisés dont parle Jovenel Moïse? Font-ils parti des 64 gangs démantelés ? Et Me. Dorval ? Et Grégory Saint Hilaire ? Qu’en est-il d’eux? Depuis le début des manifestations antigouvernementales organisées sous le règne de Jovenel Moïse, la violence policière à l’égard des journalistes ne cesse d’augmenter. Les médias et les associations de médias la dénoncent, les organisations de défense des droits humains la condamnent. Les journalistes ont manifesté pour protester mais il n’en reste pas moins que cela continue. Si les policiers les attaquent et le chef de l’État les prend pour des gangs, c’est maintenant une évidence que la liberté d’expression et le droit à l’information inhérents à toute démocratie sont en grand danger.
Le syndrome de la déresponsabilisation
A la question de la représentante de la France au conseil, Jovenel Moïse ne pouvait pas avancer ce qui expliquait le fait que Jimmy Chérisier ne soit pas encore arrêté, ce qui empêchait l’avancement de l’enquête sur l’assassinat de Me. Dorval et ni le fait que les auteurs des massacres de La Saline et de Bel’Air ne soient pas punis. En réponse, il a accusé ses opposants et s’est dédouané de cet état de délabrement dans lequel se retouve le pays.
Notons qu’un premier rapport des Nations Unies apporte les mêmes conclusions du RNDDH concernant l’implication des proches du pouvoir dans les massacres précités, qualifiés de massacres d’État. À cela s’ajoute la vassalisation des institutions : le pouvoir législatif devenu dysfonctionnel, le pouvoir judiciaire dépouillé de ses marges de manœuvre avec la main mise de l’Exécutif, le déferlement de la misère et l’incapacité de Jovenel Moïse à honorer ses promesses. Toute ces situations révoltent la population haïtienne.
Quand la justice est réprimée, la liberté d’expression est bafouée, l’État perd son caractère sacro-saint et la violence empiète sur la négociation ce qui finit par mettre la démocratie en grand danger.
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