À quelques jours de la réouverture des classes, tout semble être au point mort dans la capitale haïtienne. D’une part, les parents se plaignent, les marchands des fournitures scolaires perdent espoir. Alors que d’un autre côté, la violence des gangs a mis l’incertitude dans la tête de toute une population, pour la plupart des parents qui font face à une misère accrue.
Mildred, mère de deux enfants, nous explique qu’elle et son mari ne voient pas comment pourrait se faire cette réouverture sous les balles assassines des bandits.
“Je ne vois vraiment pas comment les établissements scolaires vont pouvoir accueillir les enfants. Les zones que les gens ont abandonnées récemment avaient des institutions scolaires, comment vont-ils faire alors qu’ils ont tout perdu?” Questionne-t-elle tout en se préoccupant elle-même de son cas.
Elle nous raconte que pour chacun de ses enfants, elle et son mari devaient verser presque le montant total de l’année scolaire pour l’un en juillet dernier, alors que pour l’autre le mois d’août était la date limite. Elle précise que si l’argent n’est pas déposé à temps, ce qui n’a pas encore été fait, ses enfants ne pourront pas se présenter en classe.
Mère célibataire, Gina, malgré ses inquiétudes, dit se fier à Dieu pour que son garçon qui est admis en secondaire 2, puisse trouver bientôt le chemin de l’école.
“Malgré les moments difficiles, depuis sa naissance il n’a jamais raté une année scolaire. Si je ne peux pas l’envoyer maintenant, je ne vais pas faire grand-chose sinon croire en Dieu. Je ne travaille pas, mais j’ai pu récupérer son carnet. Donc certainement il pourra aller à l’école dans les jours qui viennent“, nous dit Gina.
Si certains parents ont l’esprit tranquille en attendant un miracle venant du ciel, Justine, elle, ne veut pas faire la même chose. Mère de deux adolescents, pas plus tard que le 15 août dernier, elle a perdu tout ce qu’elle possédait à Carrefour-Feuilles. Maintenant, elle nous explique qu’au lieu de penser à l’école, elle essaie plutôt de voir comment elle peut nourrir sa famille.
“On essaie de lutter afin de pouvoir tout recommencer, mais le plus dur, c’est d’avoir perdu en un rien de temps tout ce qu’on possédait”, souligne-t-elle d’une voix peinte de douleur.
Pour ce qui est des marchands de toile, et d’autres fournitures scolaires, l’ambiance dans les rues n’est pas le même que les années précédentes, d’où on se bousculait soit pour acheter des livres, valises, soit pour des souliers. Pour l’instant, les marchands se questionnent pour cette réouverture.
“Pa tèlman gen lavant pase sa! On se plaint tous, on se demande si vraiment les portes des écoles vont s’ouvrir lundi prochain, puisqu’on ne voit presque pas les parents venir acheter les toiles d’uniformes“, s’inquiète une marchande de toile qui souligne qu’elle a dû faire du crédit afin de s’en approvisionner, cependant ses marchandises sont restées intactes.
Par ailleurs, la situation semble être plus difficile du côté des réfugiés de Carrefour-Feuilles qui occupent près de 30 centres scolaires privés et publics dans la capitale, selon les chiffres du ministre de l’éducation Nesmy Manigat. Jusqu’à aujourd’hui, aucune déclaration n’a été faite du côté du gouvernement pour ce qui concerne l’éducation des nombreux enfants abritant ces centres.
Pour l’instant, les rumeurs disent que les autorités ont reporté la date officielle de la réouverture des classes, pourtant aucun communiqué n’a jusque-là démenti ou confirmé ses dires. Certains citoyens estiment impossible la rentrée scolaire, alors que le ministre continue à défendre son slogan “Lekòl paka tann”
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