Le Groupe Média MAGHAITI a interviewé ce mardi 13 juillet 2021 le juriste et psychologue de carrière, Henry Claude Baltazard dans le but de compiler des informations nécessaires et d’obtenir plusieurs points de vue différents des personnalités publiques ainsi que des spécialistes dans des domaines différents sur la situation actuelle du pays après l’assassinat du président Jovenel Moïse.
Pour le juriste et psychologue Henry-Claude Baltazard, “l’assassinat du président de la République est un acte criminel de trop qui mérite d’être investigué et puni au même titre que les autres crimes et massacres perpétrés dans la République. Même un criminel ne mérite pas d’être assassiné par ses pairs ou autres adversaires. Car, il peut aider à boucler d’autres investigations“.
En ce qui concerne le déroulement de l’enquête, il pense que la démarche doit prioriser la recherche de la vérité, mais non une compétition pour prouver qui a raison ou tort. Les autorités policières et gouvernementales de fait et /ou de droit qui ont failli à leur mission de sécuriser le président de facto sont ceux qui assurent le déroulement de l’enquête. Les pays dont leurs ressortissants sont indexés dans l’affaire sont ces mêmes pays qui aident l’Etat dans l’investigation. Si une enquête vise la résolution des doutes et de problèmes, celle-là sème plus de confusion et de conflits au sein de la société! C’est pour cela que nous croyons que la formule la plus potable est celle qu’a proposée l’honorable magistrat Jean Winer Morin: une commission d’enquête indépendante de juges honnêtes, de techniciens de la DCPJ avec d’autres experts.
Quand nous lui avons demandé son avis sur les réunions de la délégation interinstitutionnelle des Etats-Unis avec les acteurs politiques, il a répondu qu’une fois de plus, ces derniers donnent raison à ceux qui disent qu’ils sont des biens meubles des pays occidentaux. Ils ne sont même pas comparables à un esclave, vu leur limite et notre passé colonial glorieux. C’est pour cela que nous devons nous impliquer beaucoup plus dans nos secteurs respectifs afin de prouver notre autonomie par rapport à l’étranger et d’éduquer les classes populaires et paysannes pour une éventuelle révolution.
Me Baltazard poursuit en nous confiant que nous avons besoin d’une réconciliation avec nous- même, d’établir l’autorité de l’indépendance de l’Etat avant de parler des élections par essence. “Toute compétition électorale est source de conflit. Comment allumer plus de feu dans un pays aussi enflammé?” s’interroge-t-il.
Par ailleurs, au questionnement sur la légitimité du premier ministre a.i Claude Joseph ou le premier ministre nommé Ariel Henry à diriger le pays selon la Loi, il a répondu qu’au regard de la Constitution, en son article 137.1: “Jovenel Moise a mis fin aux fonctions du PM Claude Joseph en provoquant sa admission et celle de son gouvernement “. Selon le principe du parallélisme des formes et des procédures en droit administratif, l’arrêté nommant le Dr Ariel Henry abroge le premier arrêté nommant le Dr Claude Joseph. Ce deuxième arrêté fait une démission consommée à travers des publications (Twitter) de Mr Joseph et de l’ex-président de facto Jovenel Moïse qui a mis un terme au contrat de Claude Joseph avec l’administration et fait de Dr Ariel Henry le PM légitime. Maintenant, il peut être au point de vue du droit et ne peut pas diriger le pays. Car dans une démocratie, la légitimité populaire est très importante”.
Le psychologue pense également qu’en dehors de toutes considérations, le geste de Claude Joseph est normal d’un bon citoyen qui voulait aider, c’est une forme d’assistance à personne en danger, consacré par l’article 52.1 de la Constitution le fait.de prendre la commande au lendemain de l’assassinat brutal de M. Moïse.
Néanmoins, cette précipitation dans les presses locales et internationales et l’évocation à tort de l’article 149 de la constitution fait de lui un usurpateur de titre et de fonction qui n’est digne de la succession.
En ce qui a trait au choix de Joseph Lambert comme président provisoire, il pense que suivant l’article 149 de la constitution, on peut faire deux considérations: la première consiste au choix de l’Assemblée Nationale. Or, il n’en reste qu’un tiers de la représentation populaire au Sénat de la République.
La seconde précise que le mandat du président provisoire expire le 7 février de la cinquième année, ce qui rend le problème entier.
Par contre, nous reconnaissons théoriquement que le poste du président du Sénat fait du sénateur Joseph Lambert le président de l’Assemblée Nationale, ce qui lui confère certaine légitimité. Toutefois, la légitimité doit être pleine et entière, donc ils peuvent prendre des initiatives comme seuls élus qui restent de la République mais avec une certaine limite pour ne pas attiser d’avantage de conflits et nous entrainer dans un cycle de gouvernements éphémères qui pourrait déboucher sur une occupation étrangère officielle.
En outre, le juriste psychologue Henry l-Claude Baltazard a déclaré que nous n’avons pas besoin d’une proposition de sortie de crise, mais de préférence plus de cohésions dans celles qui ont déjà été proposées. Nous sommes d’accord que la forme d’organisation de l’Etat n’est pas bonne. Mais pourquoi s’accrocher à un pouvoir exécutif avec un président et un PM, tous ces ministres même pendant cette période de crise ?
Il a ajouté que le moment est venu pour les acteurs sociaux politiques et politiques d’être rationnelle et patriotes, d’écouter la raison et de faire un dépassement de soi afin de mettre le progrès d’Haïti en premier. Nous avons raté des moments importants de notre histoire certes, mais nous pouvons rattraper ce train car il est encore temps. C’est l’occasion plus que jamais d’élaborer un projet de société inclusif à long terme sous la direction des forces sociales et morales de la société haïtienne sans l’implication de l’internationale.
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