L’action gouvernementale n’en finit pas d’interpeller la conscience citoyenne à diverses formes de mobilisations. Si pour certains le président Jovenel Moise doit cesser ses formules et ses tweets péremptoires et mensongers, pour d’autres, sa présence numérique doit lui permettre de glorifier son action comme de vilipender ses opposants- l’opposition, et plus globalement ceux qui le critiquent-, et de rappeler inlassablement, à travers le martèlement de phrases toutes prêtes et incantatoires, sa promesse faite lors de la campagne électorale : « M ap met lajan nan pòch nou, Manje Nan asyèt nou ».
En effet, ayant popularisé une vision pessimiste de l’état du pays – lors de la campagne électorale et misé sur la performance de ses discours Jovenel Moise a garanti qu’il instaurerait un changement radical de société. Son slogan incarnait d’ailleurs le symbole d’un populisme largement partagé.
Cependant, il arrive que ses proches se trouvent à accuser la frilosité de certains parlementaires et reprochent à certains de lui mettre des bâtons dans les roues. Cest comme se confesser auprès de l’électorat pour lui avouer que « Par tous les moyens, je me suis sacrifié pour réaliser mes promesses, mais le secteur privé, l’opposition m’en empêche » pendant que le pays souffre, le malaise sécuritaire s’accroit, l’inflation exagère, la misère bat son plein, le peuple crie et gagne les rues.
Par ailleurs, le coup de force dans les mobilisations, c’est le renouvellement radical de l’usage politique des réseaux sociaux numériques. Faisant de ces derniers une arme incontestable, la controverse et les polémiques politiques trouvent de nouvelles formes via les logiques de fonctionnement propres aux médias socio numériques tels les ashtags #KOTKOBPETROCARIBEA, #UNFOLLOWJOVENELMOISE à travers lesquels les stratégies de revendications, d’attaques, de soulèvements arrivent sur tous les fronts.
Cette stratégie de communication lancée c’est une manière de dire à l’Elite au pouvoir que le peuple est en prise directe avec les tourments qu’elle instaure. Le président se trouve donc confronté à une présence numérique qui va à la baisse devant lui pousser à tester ou à adopter de nouveaux dispositifs sociotechniques.
Par rapport aux différents effets parfois attribués a la médiatisation de la politique, la baisse de la confiance envers l’équipe gouvernementale et la tournure que prend cette nouvelle forme de mobilisation vient appuyer cette désintermédiation, la possibilité pour le président de communiquer, d’échanger directement avec son électorat, d’où un déficit d’interactivité dans la diffusion des informations. Cela va entrainer pour le moins, l’absence d’échanges directs entre le président et une partie de son électorat qui, tous dispositifs confondus, peut être analysé comme un manque de maturité de la part du premier dans sa façon de gérer les intérêts nationaux.
En tout état de fait, la logique de réseau vient jouer un rôle important dans les appels à mobilisation lancés partout à travers le pays vu que les citoyens se mobilisent plus facilement en réponse à des appels à l’action lancés sur les réseaux socio numériques que lorsque l’appel est envoyé via les canaux officiels ou présenté par les militants inconnus. Alors que les conditions de vie de la population s’aggravent, le Président perd continuellement des abonnés sur twitter. Ne serait-ce une façon de traduire l’impopularité du Chef de l’État ou du moins la faillite de l’élite dirigeante dans un environnement sociopolitique brutalisé par la corruption?
Jackson MERINOR
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