Port-au-Prince, le 6 novembre 2018._ Dans un récent rapport d’analyse publié par la Fondation Je Klere sur le dossier PetroCaribe, l’institution attire l’attention de la population sur plusieurs irrégularités graves qui peuvent nuire à la réalisation effective d’un procès juste et équitable dans le cadre de cette affaire.
Le résumé de ce rapport
Certaines firmes indexées dans le rapport du 17 août 2017 ont mystérieusement disparu dans le rapport de la commission spéciale.
D’autant que les commissaires comme les sénateurs Youri LATORTUE, Nenel CASSY et Evaliere BEAUPLAN sont aussi dénoncés par la clameur publique pour des actes qui méritent d’être élucidés. Youri LATORTUE dans la gestion de fonds attribués à la ville des Gonaïves par le gouvernement Lamothe, Nenel CASSY pour des actes reprochés à son protégé Patrick NORAME au BMPAD et Evalière BEAUPLAN pour la gestion des charriots de l’Aéroport international de Port-au-Prince.
Sous le gouvernement provisoire du Président Jocelerme PRIVERT et du Premier ministre Enex JEAN-CHARLES, un décaissement a été effectué. Le directeur du BMPAD de la période, M. Patrick NORAME est poursuivi par la clameur publique comme étant responsable de certains actes de corruption dans la gestion des fonds pendant cette période.
Le juge Ramoncite ACCIME a commis un violent excès de pouvoir en décidant, en dehors de tout réquisitoire d’informer du parquet, de commencer son instruction par l’audition des plaignants. En droit, il y a excès de pouvoir quand un juge fait ce qu’il n’aurait pas dû faire ou ne fait pas ce qu’il aurait dû faire.
Le dossier PetroCaribe, dans sa complexité, comporte donc des aspects qui doivent être traités effectivement par la CSC/CA tels les cas de concussion, de malversation et de détournements de fonds publics. Mais la Cour n’est pas compétente pour des infractions telles le délit d’initié, le trafic d’influence, la passation illégale des marchés publics, les pots-de-vin, la surfacturation, la corruption des fonctionnaires… qui relèvent exclusivement des tribunaux de droit commun.
Fort de ces considérations, la Fondasyon Je Klere (FJKL) recommande que:
1.- Le juge d’instruction saisi du dossier statue sur le réquisitoire du commissaire du Gouvernement lui demandant de se déclarer incompétent. Un juge d’instruction a pour devoir de répondre aux réquisitions qui lui sont soumises. Il ne peut pas les ignorer. Le juge peut refuser d’instruire pour les faits de concussions et de détournements de fonds ou détournement de biens publics, qui nécessitent effectivement un arrêt de débet de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif, mais le juge doit se déclarer compétent pour les faits graves qualifiés par la loi de : favoritisme, surfacturation, pots-de-vin, enrichissement illicite, trafic d’influence, délit d’initié, passation illégale de marchés publics, abus de fonction, blanchiment du produit de crime, faux en écriture publique, corruption, crime de lèse souveraineté ou crime contre la constitution, de la corruption d’agents publics étrangers et de fonctionnaires d’organisations internationales, faits prévus et punis par les dispositions des articles 109 et suivants du code pénal et des articles 5, 5.2, 5.3, 5.4, 5.5, 5.6, 5.7, 5.8, 5.9, 5.10, 5.11, 5.12 et 6 de la loi du 10 mai 2013 portant prévention et répression de la corruption, laquelle loi renverse le fardeau de la preuve et autorise des poursuites pénales contre des entreprises nationales et étrangères impliquées dans la corruption ainsi que des Hauts fonctionnaires de l’Etat ou des fonctionnaires étrangers travaillant en Haïti ;
2.- Le juge d’instruction retourne le dossier au Parquet avec son ordonnance pour voir ce Magistrat décider ce qu’il lui appartiendra ;
3.- Le Commissaire du Gouvernement, après avoir reçu le dossier du Cabinet d’instruction donne son réquisitoire d’informer pour permettre au juge d’instruction d’ouvrir l’information de manière régulière; Il peut verser dans le dossier les informations qu’il a recueillies relativement à cette affaire.
4.- L’Etat haïtien, à travers la Direction Générale des Impôts (DGI), se porte partie civile dans un tel procès. Cela donnera l’avantage à l’Etat de participer à l’instruction comme partie.
5.- Les moyens matériels à mettre à la disposition du Magistrat instructeur passent obligatoirement par le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) aux fins d’éviter les contacts directs entre ce Magistrat et le Pouvoir.
6.- Le gouvernement et le parlement adoptent une loi pour lever les obstacles à la réalisation du procès PetroCaribe, notamment les immunités. Cette loi doit venir préciser qu’en matière de lutte contre la corruption, les immunités tombent.
7.- La Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC/CA), en plus de son rapport sur la gestion des fonds PetroCaribe, juge les comptes de tous ceux qui ont eu à gérer les fonds PetroCaribe et prononce les arrêts appropriés ;
8.- Deux ou plusieurs procès PetroCaribe soient réalisés:
- Un grand procès pour les actes de corruption tels favoritisme, surfacturation, pots-de-vin, enrichissement illicite, trafic d’influence, délit d’initié, passation illégale de marchés publics, abus de fonction, blanchiment du produit de crime, faux en écriture publique, corruption d’agents publics étrangers et de fonctionnaires d’organisations internationales ;
- Un ou plusieurs autres procès séparés pour tous ceux qui auront un arrêt de débet de la CSC/CA
9.- Une commission de trois à cinq juges d’instruction soit créée pour assister et accompagner le juge d’instruction en charge du dossier. Ces juges d’instruction doivent être des Magistrats expérimentés, honnêtes et compétents ayant rendu des ordonnances qui ont résisté aux recours jusqu’à la Cour de Cassation. Les juridictions, entre autres, des Cayes, des Gonaïves, de Saint-Marc et de Port-au-Prince pourraient fournir ces perles rares ;
10.- Une commission technique soit créée pour assister le Parquet de Port-au-Prince spécifiquement dans le cadre de ce dossier. Cette commission doit-être composée, notamment, de Magistrats expérimentés de la Magistrature debout.
11.- Des mesures législatives et règlementaires soient adoptées pour éviter la répétition de tels actes, coCréer un Parquet financier pour lutter contre les crimes financiers ;
- Criminaliser l’évasion fiscale et donner à la DGI le droit d’exiger des états financiers audités des entreprises privées;
- Criminaliser les fausses tout comme l’absence de déclarations de patrimoine pour les fonctionnaires qui y sont assujettis ;
- Adopter des codes d’éthique et de conduite au niveau de la primature, de la présidence, de la chambre des députés, du Sénat de la République, de l’administration générale des douanes, de la Direction Générale des Impôts, etc… ;
- Renforcer la capacité de la CSC/CA en matière d’audit de performance ;
- Renforcer le Bureau des Affaires Financières et Economique (BAFE) de la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ)
- Organiser, par la loi, l’enquête parlementaire ;
- Introduire le plea bargain (négociation de peine) dans la législation pénale haïtienne en matière de lutte contre la corruption, l’évasion fiscale et les crimes financiers en général.
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