A chaque saison, sa destination ! Le meilleur moment pour voyager est loin d’être définitif, statique ou universel. Cela varie en fonction du continent, du climat, de l’offre, de la période, du pouvoir d’achat et surtout de la disponibilité des voyageurs.
En Haïti, la saison estivale se révèle potentiellement la plus favorable et bénéfique aux acteurs du secteur touristique mis à part les périodes de fin d’année et carnavalesque. Selon les données recueillies du Bureau de Statistiques du Ministère du Tourisme, un flux important de visiteurs vient des Etats Unis (78.21%), du Canada (8.34%), de l’Europe (6.94%) et des autres pays (6.49%) pour des raisons d’ordre culturels, pour affaires et autres. De plus, la saison estivale (Juin-Juillet-Août) marque le rendez-vous des grands événements tels que : Sumfest, Festival Bikini, Festival du rire, Spring Break, Diner en Blanc, Hangover. Sans oublier les fêtes patronales, organisées dans les dix départements du pays, drainant toujours derrières elles, une kyrielle de jeunes, de moins jeunes et/ou d’adultes qui en profitent pour se ressourcer, prier, se rapprocher de leurs familles et de leur culture entre autres.
Une analyse des flux touristiques de ces dix dernières années (2008-2018) montre une évolution en dents de scie durant la période estivale. Le secteur touristique haïtien, plus précaire que jamais, n’a pas de reins assez solides pour absorber les conséquences des moindres crises de nature sociale, économique voire politique. À chaque moindre situation de tension, c’est le premier secteur à faire les frais. La saison estivale de l’année 2008 a accusé le plus faible taux en termes de touristes de séjour soit 70334, ensuite une hausse en 2009 avec 113793 touristes, suivie d’une baisse consécutive durant les années 2010, 2011 et 2012. Parallèlement, 2015 était l’année la plus prospère avec 167390 touristes. Ce dernier chiffre justifie une certaine accalmie politique couplée aux retombées du festival des arts de la Caraibe « Carifesta «, réunissant près de 22 pays de la région, avec un total de 550 participants, partageant leur patrimoine culturel, gastronomique, artistique, etc. L’année 2018 aurait été bien meilleure sans le phénomène « Pays Lock », parvenu en plein milieu de la saison estivale, et qui a provoqué une diminution de 2,84% par rapport à 2015. Au fait, une simple observation montre que la récurrence desdits évènements politiques n’a pas favorisé les initiatives touristiques au cours de la saison estivale 2019 ; elle augure, au contraire, une catastrophe en termes d’arrivées touristiques.
Conséquences
Cette regrettable et perpétuelle crise qui sévit en Haïti, profite à nos plus proches voisins qui tendent leurs bras pour nous soutirer des devises substantielles. En plus d’accueillir en grande quantité nos étudiants, de creuser davantage notre déficit commercial ; maintenant, la République Dominicaine est considérée comme une destination de substitution ou de choix des Haïtiens de l’intérieur et de l’extérieur. Dans certains cas, des touristes visitant Haïti, court-circuitent leur voyage en faveur de la République voisine, à cause des troubles de nature socio-économique et politique.
Cette malencontreuse réalité joue en défaveur de la destination Haïti à tous les niveaux. Elle affecte négativement toutes les couches de la vie sociale, et plus sévèrement tous les maillons de la chaîne d’offre touristique d’Haïti : l’hébergement, le transport aérien et terrestre, la restauration, les activités de loisirs entre autres.
Au-delà de tout ce qui précède, Haïti est classée, d’après le Global Peace Index (GPI), comme étant le 4ème pays le plus sécuritaire de l’Amérique Centrale et des Caraïbes, devant Cuba, Jamaïque et la République Dominicaine qui restent, entre autres, les iles les plus visitées de la région.
En somme, pour parvenir à renverser la tendance, il est essentiel de travailler sur le facteur d’images de la destination, de mieux asseoir une politique rationnelle de gestion et de vulgarisation de l’information sur les réseaux et à travers les médias traditionnels, et d’opter pour le développement effectif et réel d’un pôle touristique majeur doté de toutes les structures et infrastructures nécessaires. Ce faisant, Haïti pourra renouer avec la croissance et le progrès socio-économique au bénéfice de tous les acteurs du secteur.
Arol St Felix
Entrepreneur Touristique
PDG de AyiTeam