Cette semaine, le ministre des Affaires Etrangères de facto, Claude Joseph, a marqué un point en remettant le président de la République Dominicaine à sa place. Luiz Abinader, épinglé dans le scandale “Pandora Papers”, se sert à maintes reprises de la situation chaotique qui règne en Haïti pour briller sur la scène internationale. Dans un Tweet en date du 1er novembre, le chancelier haïtien à rappelé à ce dernier que la République Dominicaine fait aussi partie de la liste noire du Département d’Etat américain, concernant les pays à ne pas visiter à cause de la montée de la criminalité.
Claude Joseph en a profité pour encourager le gouvernement dominicain et celui d’Haïti à travailler d’un commun accord pour endiguer le problème de l’insécurité sur l’Île. Ce message a fait l’effet d’une avalanche sur le plan diplomatique. En guise de réaction, le gouvernement dominicain a annoncé la suspension des visas étudiants pour Haïti, et d’autres mesures radicales comme l’interdiction de servir les immigrants illégaux sur le sol dominicain. Le 5 novembre dernier, le Diario Libre a annoncé que le président de la République Dominicaine Luis Abinader, de concert avec le conseil national de la sécurité et de défense a activé l’opération Gabion dans la Frontière haïtiano-dominicaine, qui consiste à interdire les Haïtiens de se rendre en République Dominicaine et de stopper les échanges commerciaux jusqu’à nouvel ordre. Mais l’article a été effacé 3 heures de temps après sa publication.
Depuis quelques mois, les immigrants haïtiens qui ont fui leur pays à cause de l’insécurité vivent le martyr en République Dominicaine. Le gouvernement dominicain fait pression sur les propriétaires de maison et les propriétaires d’entreprise de ne pas faire affaire avec les immigrants qui n’ont pas de carte de résidence. Les prix des appartements ont été révisés à la hausse durant les deux dernières années. De plus, nos compatriotes sont privés de leur liberté de circuler normalement à cause des mesures drastiques de l’Immigration Dominicaine, qui procède à l’arrestation des Haïtiens qui vivent illégalement sur leur territoire. Chaque mois, plusieurs milliers d’Haïtiens sont déportés comme des animaux sauvages en Haïti ; parfois, ils se font dépouiller de tous leurs biens durant le processus de déportation.
Et pourtant, Haïti représente près de 90 % des recettes des grandes entreprises alimentaires de la République Dominicaine, puisque le pays ne produit plus rien depuis quelques années. Les rares produits alimentaires récoltés par les cultivateurs haïtiens ne sont pas distribués normalement à cause de la guerre des gangs dans des zones stratégiques.
Nos ressortissants achètent le visa dominicain jusqu’à $600 américain. Ils louent des appartements entre US $150 à $500 par mois et font bouger l’économie dominicaine, puisqu’une grande partie des transferts d’argents de la diaspora haïtienne est dirigée vers ce territoire. Sur le plan alimentaire, nous dépendons de la République Dominicaine. Ils ont plus à perdre si la frontière reste fermer, cela aura beaucoup d’impact sur leur économie… Et pourtant, c’est nous qui subissons les caprices des Dominicains.
Comment faire pour retrouver notre fierté ? Quelle est la bonne formule pour rendre Haïti vivable et permettre à nos jeunes professionnels de retourner au bercail ? Quelles sont les bonnes formules pour rendre notre économie prospère comme celle de notre voisin ? Ce sont des questions qui restent sans réponse.
En attendant, le Premier ministre de facto Ariel Henry s’est vu dans la nécessité de faire le mea-culpa auprès du gouvernement dominicain pour éviter d’autres représailles sur les quelque 3 millions immigrants sans papiers haïtiens qui vivent chez notre voisin. Mais comme l’a si bien dit Claude Joseph, l’île n’a pas un seul président…
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