Port-au-Prince, le 31 octobre 2018._ Les funérailles de six militants tués lors de la grande manifestation du 17 Octobre à Port-au-Prince, ont été chantées dans la matinée devant l’Église Notre Dame du Perpétuel Secours, à Bel-Air. La cérémonie a été perturbée par une patrouille de la Police Nationale à coup de gaz lacrymogènes, ce qui a transformé les obsèques en manifestation de rue.
Alors que les familles et proches des victimes pleuraient le départ subite de six (6) jeunes, une patrouille du corps spécialisé BOID aurait dispersé la foule en lançant des grenades lacrymogènes et en tirant en l’air, d’après les témoins. Furieux, les participants ont organisé une manifestation instantanée en trainant derrière eux 4 cercueils dans les rues du Centre-ville. Plusieurs centaines de personnes ont participé dans ce mouvement de panique.
Les agents de CIMO ont à nouveau dispersé la manifestation aux environs de la Place Nèg Mawon, à quelques mètres du palais national. Les protestataires ont répliqué avec des jets de pierre et de bouteilles et en dressant des barricades enflammées dans tout le centre-ville. Plusieurs blessés par balle ont été recensés par nos reporters, un jeune garçon atteint au pied et un marchand qui a reçu un projectile dans le dos. Ils ont été transportés à l’hôpital en toute urgence.
Des slogans hostiles ont été lancés envers le gouvernement, spécialement à l’endroit du Président Jovenel Moise. La Police Nationale d’Haïti, elle aussi, a été pris pour cible dans par les manifestants, qui disent « préférer le puissant chef de gang Arnel du Village de Dieu qu’au lieu des policiers ».
« Voilà le cercueil d’une jeune fille dans la vingtaine qui habitait à la Rue Nord Alexis (Lalue). Elle était enceinte, elle est décédée d’une éclampsie quand la police a bombardé sa zone avec des bombes lacrymogène le 17 octobre dernier », nous raconte une vielle dame proche du défunt. « Maintenant nous allons voir Arnel pour porter plainte, puisque le gouvernement nous massacre », poursuit-elle.
Arrivé au Village de Dieu, la foule qui trainait avec les cercueils a été accueillie par une dizaine d’hommes lourdement armés qui entouraient leur chef Arnel. En vêtement déconcentré, muni d’une arme de pointe de calibre 9 mm, l’homme fort de Grand-Rue a constaté le faits pour rentrer chez lui par la suite, sur l’applaudissement des manifestants et des riverains de la zone.
Le numéro deux de cette bande armée se dit attristé de voir les cadavres et les marques de projectiles sur certains, « nous sommes des révolutionnaires, notre mouvement concerne toute la population. Si la police ne veut pas dégénérer les choses, qu’il vous laisse manifester en paix », affirme-t-il.
« C’est un honneur de rencontrer les représentants de ces cadavres. C’est l’heure de prendre le contrôle de la rue, c’est l’heure d’arrêter de nous entretuer dans les quartiers populaires. C’est le régime en place qui est à la base de cette situation puisqu’il se sent qu’il n’est pas confortable », a-t-il continué.
Tard dans l’après-midi des rafales d’armes automatiques ont été entendues dans la 3e circonscription de Port-au-Prince; la route de Grand Rue a été désertée par tout le monde, même par les agents de la PNH.
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