Stéphanie Désir, âgée de 34 ans, vit en Plaine, dans la commune de Cité Soleil. Depuis plus de onze ans, elle vit avec une maladie neurologique connue sous le nom de polyradiculonévrite inflammatoire. Elle a déjà subi une opération médicale en Haïti au niveau de la cheville. En raison de certains risques médicaux majeurs, elle a dû renoncer à une autre intervention prévue au niveau du genou.
En octobre dernier, elle a été victime d’une arnaque qui pourrait lui coûter la vie, perpétrée par un dénommé Moïse Vincent, qui s’était présenté comme un employé du Bureau du Secrétaire d’État à l’Intégration des Personnes Handicapées (BSEIPH). Il convient de souligner que ce dernier lui avait promis de l’aider à obtenir un visa humanitaire pour le Mexique, afin qu’elle puisse y subir une opération, sa maladie étant très rare et coûteuse.
Interview avec Stéphanie Désir sur l’arnaque de Moïse Vincent à son égard
Romy Jean François : Comment avez-vous fait la connaissance de cette personne, Moïse Vincent, qui vous a proposé son aide alors que votre maladie s’aggravait de jour en jour ?
Stéphanie Désir : Ma rencontre avec Moïse Vincent a eu lieu après une campagne de sensibilisation durant laquelle j’avais sollicité l’aide du Bureau du Secrétaire d’État à l’Intégration des Personnes Handicapées (BSEIPH). Le secrétaire avait chargé Claude Emmanuel Camille, le responsable de la communication du bureau, de coordonner les rencontres avec toutes les personnes souhaitant me rencontrer. C’est alors qu’il m’a informée qu’un certain Moïse Vincent allait me venir en aide, car il dirigeait une organisation. Il lui a donné mes coordonnées afin qu’il puisse me contacter.
Il faut préciser qu’à cette époque, j’étais en train de demander un visa humanitaire et de rencontrer des organisations susceptibles de m’aider à couvrir les frais médicaux. C’est dans ce contexte que Moïse Vincent m’a proposé son aide. Il m’a dit qu’il pouvait faciliter l’obtention d’un visa humanitaire pour le Mexique, affirmant qu’il entretenait de bonnes relations avec le consul d’Haïti au Mexique. Il s’est proposé de m’accompagner dans le reste des démarches.
Romy Jean François : Qu’est-ce qu’il vous a promis en particulier ?
Stéphanie Désir : Étant une personne à mobilité réduite, il m’a assuré que mon visa serait gratuit. Cependant, il m’a précisé que je devais payer les frais pour les deux autres personnes qui allaient m’accompagner.
Romy Jean François : Combien d’argent avez-vous versé, et comment les paiements se sont-ils effectués ?
Stéphanie Désir : Je lui ai versé la somme de 7 000 dollars américains en deux versements, ainsi que 42 500 gourdes, dont je détiens toujours les preuves. Tout d’abord, je lui ai remis 5 000 dollars en main propre. Ensuite, je lui ai transféré 2 000 dollars sur un compte en dollars à la Capital Bank. Quant aux 42 500 gourdes, je les ai envoyées sur son compte MonCash.
Romy Jean François : Est-ce que M. Moïse Vincent avait lancé les procédures comme promis ?
Stéphanie Désir : Cette affaire devait se dérouler entre les mois d’octobre et novembre 2024. C’est à ce moment-là que nous avons réalisé que M. Moïse Vincent nous avait donné un faux rendez-vous. Celui-ci était fixé pour le mois de novembre, mais en raison de la situation chaotique dans le pays, l’ambassade n’a pas pu ouvrir ses portes. Tous les rendez-vous ont été reportés au mois de décembre, mais Moïse Vincent était devenu injoignable sur tous les numéros de téléphone qu’il nous avait communiqués.
Romy Jean François : Quel lien existe-t-il entre M. Moïse Vincent et Claude Emmanuel Camille ?
Stéphanie Désir : Selon des sources fiables, j’ai appris que Moïse Vincent fait partie du BSEIPH. C’est grâce à lui que Claude Emmanuel Camille aurait obtenu le poste de responsable de la communication de ce bureau.
Romy Jean François : Avez-vous reçu d’autres aides après cette arnaque de Moïse Vincent ? Et que se passerait-il si vous ne récupérez pas cet argent ?
Stéphanie Désir : Non, je n’ai reçu aucune autre aide depuis la dernière levée de fonds. J’essaie de me battre contre cette maladie avec les faibles moyens de ma famille et de mes amis. Ce sont eux qui m’aident à garder le sourire malgré tout. Mon état de santé se dégrade de jour en jour. Sans une prise en charge médicale continue, je risque la paralysie à vie. Et sans les fonds nécessaires pour une opération urgente, je pourrais perdre la vie. Récupérer cette somme est devenu, malgré tout, mon seul espoir.
Romy Jean François : Qu’exigez-vous de la justice haïtienne ?
Stéphanie Désir : J’exige, du fond du cœur, que la justice de mon pays m’aide à récupérer cet argent. Je sais que le doyen du tribunal de première instance fait tout ce qui est en son pouvoir pour que le jugement se tienne dans les plus brefs délais, car il est conscient que le temps joue contre moi. Je veux que tout se déroule comme il se doit. Et si quelqu’un souhaite m’aider, honnêtement et sans arnaque, il peut le faire via les réseaux sociaux.
Moïse attend son jugement, et Stéphanie espère sauver sa vie avec cet argent
Il est important de rappeler que Moïse Vincent a été arrêté le 31 janvier 2025. Actuellement, il est en garde à vue au commissariat de Delmas 33 depuis trois mois. Stéphanie Désir attend avec impatience que justice soit rendue. C’est pourquoi elle en appelle au secteur des droits humains et aux organisations féministes afin de l’aider à récupérer son argent entre les mains de cet homme.
Elle lance un appel à l’humanité de tous les Haïtiens, vivant tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Elle conclut, non sans émotion : «Faisons un faisceau pour sauver ma vie de cette maladie neurologique. Je pense que le reste, c’est à l’État haïtien de décider de la peine à réserver aux arnaqueurs et fraudeurs sans état d’âme.»
Romy Jean François
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