Naissance d’une créatrice unique et originale
Connue sous le nom d’artiste Mileva Roumer sur tous les réseaux sociaux, Mileva Girault Roumer est une jeune créatrice qui évolue à l’extérieur du pays. Avec une passion démesurée pour l’art, elle cherche à exprimer un ressenti, une formulation visuelle au-delà des mots, en ce sens, elle ressemble à ce profil d’artiste qui par la couleur, la poésie, la sculpture, la peinture et l’écriture cherche à amener sa propre lumière dans le monde.
«Pour avoir pu emprunter cette voie, j’ai été une observatrice des gens qui m’entourent, de la nature. Ancrée dans cette exploration humaine, j’ai cherché à comprendre les gens au-delà de l’ego, au-delà de nos blessures, cette nature humaniste, cette exploration de la nature dans toute sa richesse m’a amené sur ce point où j’ai pu le transporter.», nous partage-t-elle.
Mileva a étudié l’art visuel et l’entrepreneuriat. Selon elle, c’est l’art qui l’a choisie avant qu’elle ne puisse avoir les outils nécessaires pour emprunter ce chemin artistique en toute confiance. Elle rajoute que l’instabilité organisée d’Haïti, les segmentations qu’elle a observées dans la société et dans notre vécu collectif, pour elle, nous ont rapidement permis, malgré les difficultés, de chercher une porte en dehors du monde.
«Pour continuer à respirer dans ce chaos et dans cet assassinat de notre mémoire collective, la lecture, l’écriture, la poésie et le dessin se sont présentés comme une bouée de sauvetage. Mon focus actuel est dans ma vision artistique et dans ma carrière d’artiste.», continue-t-elle.
Mileva Roumer est une artiste multidisciplinaire, elle jongle, jauge et patauge entre la photographie, la sculpture, l’illustration, la peinture et l’écriture. Écrivaine et poétesse dans l’âme, elle utilise sa poésie comme un tremplin pour parler de la nature, de l’écologie et de notre humanité qui transcende toutes les barrières. Sur ce, elle lance sans ambages : «Au-delà des barrages sociaux, des limites que nous nous imposons, nous tissons à travers nos rencontres une étincelle de changement qui ouvre toutes les portes que nous croyons fermées. La poésie chante dans la langue du cœur, elle fait revivre ce que nous pensions ne plus retrouver dans mes œuvres».
Une jeune créatrice et ses œuvres
De la famille des Roumer à la cité des poètes, Jérémie, Mileva fait de l’art depuis son enfance. Alternant entre les circonstances de la vie et son désir sempiternel de poursuivre cet appel de sa nature, elle organisa ses propres expositions en Haïti, pour mettre en valeur le travail de beaucoup d’artiste exceptionnel qui ont continué à lutter à travers leur art et à en vivre malgré les difficultés. Elle clame haut et fort que cela a été une expérience tellement enrichissante qu’elle a beaucoup appris d’eux. Mileva a déjà participé à des expositions telle que la foire de l’illustration avec le populaire à Montréal et à des expositions au Québec.
«Ma dernière exposition est à Montréal avec Cje expose, cette exposition collective peut être visitée jusqu’en septembre, et une autre qui a pris fin le 10 juillet dernier. J’ai fait des prestations de poésie régulières sur scène avec le Mtlartnook. J’ai aussi écrit deux recueils de poésie et d’autres projets de collaborations avec des artistes dont des livres qui sont en cours», languit-elle.
Elle vient d’écrire un livre ayant pour titre «Les filaments de l’être» dont le lancement officiel se fera à Montréal en ce mois d’août 2024. Ce livre a été inspiré d’Haïti, des blessures et les cassures dont nous avons hérité depuis l’indépendance et aussi depuis des générations de révoltes. Pour elle, nos souffrances sont encore là, elles se sont déguisées sous le joug des soi-disant classes sociales, de la violence, de l’abus que chacun vit. Mileva rajoute : «Cette guérison, ce souffle dont nous avions eu besoin de prendre, il n’a jamais été là. Ce livre se veut être une exploration spirituelle et humaine. Il doit nous inciter à poser des questions. Qui sommes nous en dehors de ce que l’on nous a imposé ? Pouvons-nous être autre chose ? Un meilleur monde, sera-t-il possible ? Tant de questions, et pourtant, il faut aller à la racine, aux filaments de l’être pour le trouver.»
Sachant qu’elle vient de publier cet œuvre disponible sur Amazon, il est important de souligner que Mileva à ses racines dans la ville de Jérémie mais elle est née à Port-au-Prince. Elle mentionne d’emblée qu’elle a eu l’opportunité de grandir dans la cité des poètes, ce lieu ou le vert sauvage s’étale dans les roseaux. Bien qu’elle porte la Grand-Hanse dans son cœur, elle pense que la liberté d’aller vivre ailleurs vient de cette richesse d’être, de qui on veut être et de vivre sans que le nom de famille, sans que l’héritage familiale n’empiète sur son identité. Elle continue pour dire qu’on est tous humains, qu’on a le droit de découvrir qui on est et à chaque fois que l’on cherche à en mettre un dans une boîte, on lui enlève sa complexité et sa dualité.
Mileva et son engagement social et politique
Il faut noter que Mileva Roumer continue son art à l’étranger malgré toutes les difficultés rencontrées au cours de route, elle croit dure comme fer que tous ceux qui réussissent ailleurs ne réussissent pas parce que c’est plus facile, mais parce qu’il y a déjà des structures qui permettent une accessibilité à des opportunités et que la lutte est toujours là.
«La question serait de rendre des structures de visibilité accessibles pour des artistes dans le respect de leurs œuvres créatives. Haïti est une nation d’artistes et d’amateurs d’art. Beaucoup de gens qui m’ont supporté, même à l’étranger, sont Haïtiens. Beaucoup essaient de tout cœur, par leur travail, de créer des espaces collectifs pour partager la richesse créative d’Haïti», lance-t-elle non sans langueur.
La jeune créatrice s’est donnée à l’art dans tout son intégralité, elle partage avec le monde une part d’elle. Sa sensibilité, sa vision du monde et son sourire enveloppant porte en eux le charme d’un art nouveau et c’est ce qui fait son originalité. Elle voulu être journaliste quand elle était petite, elle voulait changer le monde mais aujourd’hui elle a appris à se changer soi-même et à devenir le changement qu’elle rêve de voir. Elle avoue qu’elle envisage une carrière d’artiste et d’écrivain pour le reste de sa vie afin d’emprunter un chemin en union avec son héritage, celui d’Emile Roumer et de ses parents.
Message à la jeunesse haïtienne
Si Mileva pouvait rencontrer tous les jeunes du pays elle leurs dirait de devenir le changement, d’incarner la sagesse, l’amour et la tolérance. Elle leur demanderait de pensez avant de placer un mot et aussi qu’il choisit bien l’arbre qu’ils décident de nourrir. Elle ajouterait : «Toutes les distractions sont là, toutes les difficultés s’allongent, mais vous, que voulez-vous ? N’attendons pas de l’aide mystérieuse, elle ne viendra pas, il faut former des collectifs de jeunes, veiller les uns sur les autres. Les classes sociales, les croyances religieuses, les couleurs de peau ne font pas de distinctions quand le danger arrive, alors n’attendez pas, unissez-vous !»
Pour elle, la jeunesse haïtienne a toute la force nécessaire pour tout surmonter comme les esclaves à Saint-Domingue en 1804, car, l’indépendance d’Haïti n’était qu’un rêve pour plus d’un et pourtant elle est arrivée. Etant philanthrope, humaniste et progressiste, elle les invite de tout cœur à ne pas se laisser abattre par la voracité des politiciens, par les mensonges et les coups bas qu’ils subi.
«En attendant, il faut continuer à vibrer, à vivre, à inviter la joie dans son existence, c’est le premier fil du changement. Il n’est jamais trop tard pour choisir autrement, le passé doit nous servir de leçon, notre destinée est entre nos mains», conseille-t-elle aux jeunes qui pensent que le souffle du changement ne soufflera jamais sur Haïti.
Mileva Roumer est une inspiration pour tous et en particulier les jeunes, une créatrice qui, bien qu’elle évolue à des milliers de kilomètres de sa terre natale, vit nostalgiquement d’un pays asphyxié et vilipendé, malgré lui, depuis des années. Sa force vitale et son énergie sur les réseaux sociaux laisse croire que son influence dépasse toutes les frontières, et que celui-ci ne vise qu’à promouvoir une nouvelle acception de la vie tout en déconstruisant les discours néfastes des pseudo-influenceurs qui véhiculent sur le net. Elle est une flamme vivante dont chaque étincelle porte en elle un message d’amour, de paix et d’espoir.
Romy Jean François
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